1968
La Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles est mise sur pied par des étudiants en médecine, en soins infirmiers et en sociologie de l’Université McGill qui sont préoccupés par le peu de services médicaux dans le quartier. Ces étudiants sont inspirés par le modèle des cliniques populaires existant dans certains quartiers pauvres des États-Unis. Selon ce modèle de médecine communautaire il existe un lien entre la pauvreté, les conditions de vie et l’état de santé. Des citoyen-ne-s du quartier sont rapidement intégrés au projet.
C’est la première clinique communautaire établie dans un quartier populaire au Québec. On y pratique la médecine familiale et les gens du quartier peuvent recevoir des services médicaux gratuitement, et surtout, on s’attaque aux causes de la maladie.
A cette époque, outre les étudiants en médecine, le personnel comprend une infirmière, un médecin à demi-temps et un psychologue. On y pratique une médecine qui relie les problèmes de santé et les problèmes sociaux et, surtout, on intervient sur leurs causes.
1970
La Clinique est incorporée et obtient sa charte d’organisme communautaire. C’est à ce moment que le conseil d’administration (CA) de la Clinique devient majoritairement citoyen. Le rôle du CA est de voir à l’exécution des orientations prises lors des assemblées générales. Ces assemblées citoyennes sont souveraines. L’équipe de travail compte alors 17 personnes.
1971-1973
Inspiré par les cliniques populaires de l’époque (Clinique St-Jacques, Clinique du peuple de St-Henri et Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles), le gouvernement du Québec prévoit la création de Centres locaux de services communautaires (CLSC) à la grandeur de la province (projet de loi 65). La Clinique appui cette idée, mais demande à ce que les CLSC soit contrôlés par les citoyen-ne-s. C’est la première grande lutte pour la survie de la Clinique, qui demande à ne pas être transformée en CLSC.
1974
Les CLSCs sont officiellement créés.
La Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles demande l’élargissement de la loi afin que les cliniques populaires soient reconnues. La bataille contre le projet de loi 65 porte fruit et la Clinique est reconnue comme étant un organisme communautaire autonome avec mandat de CLSC (actuellemnt le seul au Québec). La Clinique est subventionnée comme un CLSC, mais peut conserver sa structure décisionnelle citoyenne.
Brins d’archive… La santé mentale à Pointe-Saint-Charles |
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Article: « La santé mentale à Pointe St-Charles : vers une prise en charge collective », par Luc Blanchet, Santé mentale au Québec, vol. 3, n° 1, 1978, p. 36-43. Merci à la revue Santé mentale au Québec et à Érudit qui nous ont permis de diffuser intégralement cet article. Article: L’intégration des services de santé mentale de première ligne. Étude du modèle développé à la Clinique communautaire de Pointe-St-Charle, par Michel Perreault, Jocelyne Bernier, Hélène Tardif et Céline Mercier, Le devenir des cliniques externes de psychiatrie, Volume 24, numéro 2, automne 1999. |
1977-1979
L’histoire se répète. Le gouvernement du Québec veut forcer la Clinique à devenir un CLSC. Suite à une grande mobilisation, le ministre de la santé de l’époque, M. Lazure, confirme finalement le statut particulier de la Clinique en 1979 : « Compte tenu de votre existence antérieure à l’implantation des CLSC, le ministère des affaires sociales a confirmé son intention de ne pas vous assimiler à ce type d’établissement mais bien de respecter la spécificité de votre organisme. »
Au fil des ans, la Clinique augmente son offre de services et son personnel passera de trente à quatre-vingt-dix employés entre 1974 et 1986.
1990-1993
En 1992, l’adoption de la «Loi sur la santé et les services sociaux» constitue un point culminant de la lutte pour l’autonomie de la Clinique. Le projet de loi C-120 menace la survie de la Clinique en la plaçant devant un choix qui n’en est pas un : soit la Clinique conserve sa charte d’organisme communautaire ‘privé’ et perd alors son permis de CLSC ainsi que le financement qui lui ai rattaché, soit elle devient un CLSC ‘public’ et renonce à sa charte et à son mode de fonctionnement communautaire.
La Clinique et les citoyen-ne-s du quartier se mobilisent d’une manière sans précédant: assemblées publiques de plus de 600 personnes, pétition signée par près de la moitié de la population adulte du quartier déposée à Québec par une délégation du quartier appuyé par les élus municipaux, participation à la commission parlementaire, théâtre de rue, manifestations devant les bureaux de la Régie régionale et du Ministère de la Santé et des Services Sociaux, etc.
Le ministre Marc-Yvan Côté cède finalement face à cette pression et la loi C-120 est amandée pour protéger le statut particulier de la Clinique. On doit l’échec de cette tentative d’assimilation à une grande mobilisation de la population et des groupes communautaires du quartier.
Le revers de cette grande victoire est le fait que l’allocation des budgets se fait de plus en plus via les programmes déterminés par le gouvernement – c’est la Régie Régionale, créé en 1993, qui devient le nouvel interlocuteur financier de la Clinique. Il devient donc de plus en plus difficile pour la Clinique de répartir les montants reçus selon les priorités décidées par le quartier. Bien que cette situation soit préoccupante, c’est peut-être le compromis nécessaire à la survie de la seule clinique communautaire encore gérée par un conseil d’administration 100% citoyen.
Source : Le collectif Courte Pointe, Pointe-Saint-Charles : un quartier, des femmes, une histoire communautaire, Éditions du remue-ménage, Montréal, 2006.
2003-2007
Fin 2003, le gouvernement Charest adopte une série de lois contraignantes sous le bâillon: ce sont les lois 7 et 8, qui «dé-syndiquent» certaines catégories de travailleuses et de travailleurs: lois 25 et 30, qui imposent des fusions d’établissements et d’accréditations syndicales dans le secteur de la santé et des services sociaux ; loi 31, qui favorise la sous-traitance.
C’est à ce moment, sous la loi 25, que naissent les centre de santé et de services sociaux (CSSS) de la fusion de CLSC, de centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) et, dans la majorité des cas, d’un centre hospitalier.
La Clinique lutte une fois de plus pour sa survie! Les travailleurs et travailleuses de même que la population du quartier mène une grande lutte pour tenter d’empêcher l’annexion de la Clinique au CSSS Sud-Ouest-Verdun.
En 2005, suites à l’adoption de ces lois, l’Agence réouvre la convention de financement de la Clinique. À ce moment le gouvernement veut que la Clinique soit financée par le CSSS selon les priorités du CSSS. Suite à deux années de négociations serrées entre l’Agence de Montréal, la Clinique et le CSSS Sud-Ouest/Verdun , c’est la victoire! Il y a signature d’une entente de financement entre la Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles et l’Agence de santé et services sociaux de Montréal.
Cette entente permet à la Clinique de :
- garder son statut alternatif d’organisme communautaire autonome avec mandat de CLSC au sein du système de santé du Québec,
- continuer à recevoir les budgets accordés aux CSSS pour la mission CLSC, de recevoir les budgets accordés aux CSSS pour développer des ententes de services avec les groupes communautaires du quartier,
- recevoir toutes les informations nécessaires et de participer aux comités de travail de l’Agence ou du CSSS qui sont pertinents à notre mission CLSC,
- développer une entente de partenariat avec le CSSS afin d’assurer à notre population l’accès aux services non offerts par la Clinique (ex. services de 2ième ligne).
La Clinique n’est donc pas assujettie au CSSS comme le sont les autres CLSC et continue de recevoir son financement directement de l’Agence de la Santé et des Services Sociaux de Montréal.
2014
La loi 10 du Ministre de la santé et des services sociaux, Gaétan Barrette, réorganise l’ensemble du réseau de la santé dans 18 super établissements: les Centres intégrés de santé et services sociaux (CISSS) et les Centres intégrés universitaires de santé et services sociaux (CIUSSS). La Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles n’est pas fusionnée à une des super structures nouvellement crées. Par contre, la loi 10 a pour effet de faire disparaître l’Agence de la santé et des services sociaux de Montréal et le Centre de santé de services sociaux (CSSS) Sud-ouest-Verdun, soit les deux interlocuteurs de la Clinique en ce qui concerne son financement, sa reddition de compte et ses collaborations avec le réseau de la santé. Pour l’instant, rien n’indique que notre entente de gestion annuelle et le financement de nos services ne seront pas renouvelés.
2018
La Clinique fête ses 50 ans!!
Aujourd’hui
La Clinique compte près de 130 employé-e-s de tout statut. Elle est toujours autonome et continue d’assurer son mandat de CLSC. Elle rejoint annuellement près de 40% des résident-e-s du quartier.
Plus que jamais, ce projet communautaire original et étroitement lié à l’histoire de notre réseau public de santé, est un dossier à suivre et une belle histoire de quartier à poursuivre…